Aux suivantes

Je prends une grande inspiration par la bouche, ça ne me soulage pas plus. Ma gorge est aussi sèche que mes narines. Le grand verre d’eau que j’ai englouti n’y change rien. L’air est écrasant, mon corps est moite de chaleur et d’angoisse. Je suis descendue pour me calmer, mais je ne veux croiser personne. Alors je suis vite remontée, aussi silencieusement que j’ai pu, m’enfermer dans cette chambre étouffante. J’ai lu pour semer mon cerveau, mais il est trop rusé pour se faire avoir par des techniques vieilles comme le monde. Maintenant je me tourne et me retourne dans mon lit. Je n’arrive ni à pleurer, ni à dormir, ni à empêcher mes mains de trembler. Dès que le soleil se lèvera je quitterai cet endroit.

***

J’étais pourtant bien sure de moi, lorsque j’ai décidé. Et j’en étais fière. C’était il y a deux semaines à peine. Je marchais sans but précis dans les rues, ou plutôt, avec un but qui ne figurait sur aucune carte, mais quelque part dans mon esprit.

Mes yeux ont erré sur le trottoir. Vais-je finalement le faire ? La réponse était peut-être inscrite dans les lignes irrégulières du bitume. J’ai souri. Absurde. La réponse, je l’avais déjà. Ma décision était prise depuis longtemps, je le savais. Je n’ai pas fait toutes ces recherches, pris tous ces renseignements pour rien. Je cherchais juste bêtement un signe pour ne pas être seule à en porter la responsabilité. Ce n’est pas que moi, c’était écrit, alors c’était ce qu’il fallait faire. J’ai toujours fonctionné comme ça pour les choses importantes, ce n’est pas maintenant que ça va changer. En vérité je laisse surtout le hasard choisir pour moi.

Et pourtant, il y a des décisions qu’il ne faut pas prendre à la légère. Au bout de 7 ans, la légèreté a bien été pesée. Et 7 c’est un chiffre parfait : les 7 merveilles, les 7 jours de la création, l’âge de raison… Bref, 7 ans, il était temps. J’ai relevé la tête en souriant, le cœur gonflé du poids dont je l’avais débarrassé. Un garçon m’a regardée bizarrement, ça m’était égal pour une fois.

J’irai la semaine prochaine, le 4, c’est bien le 4. C’est pile un mois après le jour de mon anniversaire, alors c’est bon signe. Ok, il faut arrêter avec les signes, on a dit.

***

J’ai rabattu la couette sur ma poitrine, espérant que son poids familier m’apaiserait. Les images se pressent dans ma tête. Je le vois, assis devant moi. Je vois son dos dans son manteau noir, bien droit, maître de lui. Il ne flanchera pas. J’imagine l’air supérieur qu’il se donne sur son visage que je ne peux pas regarder. J’en ai la nausée, j’ouvre les yeux pour m’en débarrasser, vite. Mais il est là, partout. Il rôde dans chaque coin de la chambre. Il passe en revue les livres sur l’étagère, puis s’approche avec nonchalance. Il s’assied sur le lit à côté du mien et, me regardant avec condescendance, il soupire : « T’es vraiment immature, je t’ai rien fait ».

J’allume la lumière pour le faire disparaître, au moins un instant. Mais il va gagner, encore une fois, il n’y a pas d’autre issue. Que j’aie arrêté de le protéger n’y changera rien.

***

J’y suis donc allée le 4, mais ce n’est que le 5 que ça s’est fait officiellement. Tant pis, va pour le 5 alors. Je me souviens comme j’ai passé du temps devant mon armoire. Comment faut-il s’habiller pour ce genre d’événement ? Quelle image de soi doit-on donner ? Finalement, j’ai mis ce qui me faisait plaisir. Après tout, c’était une fête pour moi, l’accomplissement de deux longues années de ressassement.

J’ai tenté de garder cet état d’esprit durant le trajet. Je ne voulais penser à rien, surtout pas à mes mains devenues collantes contre la barre du métro, à mon regard incapable de se fixer, à mon pouls plus bruyant pour mes oreilles que le ronronnement de la rame. Je sentais tous les yeux braqués sur moi, j’ai eu peur de trébucher dans chaque escalier. Enfin, je suis arrivée.

J’étais encore fébrile quand j’ai pris place dans la file d’attente. Je me suis remémorée un témoignage que j’avais vu sur Internet, ça se finissait mal, très mal. J’ai chassé cette image de ma tête. De toute façon, lorsque ça se passe bien, les gens ne témoignent pas. Le tour de la dame devant moi est venu. Puis le mien. Mon tee-shirt s’était soudé à mon corps mais, à force d’attendre, j’avais fini par me sentir à ma place. Un gardien de la paix m’a laissée entrer en me demandant pourquoi je venais. J’ai répondu d’une voix calme et basse, mais suffisamment fort pour ne pas avoir à me répéter : « C’est pour une plainte, pour viol ».

C’est une femme qui m’a écoutée, longuement, raconter mon histoire. Je ne savais pas quel ton adopter, quelle émotion arborer. Suis-je crédible si je ne pleure pas ? J’ai commencé avec prudence, jaugeant ses réactions. Elle était attentive, prenait quelques notes, me posait parfois des questions pour préciser un détail : à quelle heure avez-vous quitté le bar ? Puis j’ai tout dit de façon mécanique, factuelle. Pas besoin de filtres, pas de risque de la choquer, de la mettre mal à l’aise. Elle ne me connaît pas et c’est son métier. Elle peut tout entendre, elle veut tout entendre.

Comme je rapportais les paroles odieuses qu’il m’avait répétées pour me faire céder, elle m’a dit : « J’ai plein de noms d’oiseau qui me viennent en tête, que je vais garder pour moi ». J’ai ri intérieurement. Qui utilise encore des expressions pareilles ? Ça m’a détendue, il n’y avait pas la lourdeur à laquelle je m’étais attendue. J’ai pris beaucoup de recul en 7 ans, mais tout de même, j’avais préféré laisser de côté le mascara.

Ils n’ont pas pris ma plainte. Ils n’avaient pas le service adéquat, ici, pour enquêter sur ce genre d’affaires. Alors ils ont contacté le magistrat, et c’est à un DPJ – District de police judiciaire - qu’ils l’ont confiée. Leur commandant m’a appelée plus tard dans la journée, alors que je traversais le Pont Neuf. Il voulait « m’entendre ». Ça m’a fait tout drôle, j’ai eu l’impression d’être tombée dans Engrenages. Puis, passée l’excitation de me sentir l’héroïne d’une série policière, j’ai été envahie d’une joie immense. Je ne peux pas la décrire. Je me suis appuyée sur le rebord en pierre, comme tout bon touriste, face à la Seine, j’ai contemplé l’eau calme qui brillait sous les rayons et je me suis sentie comme elle.

Ça ne s’est donc fait que le lendemain, le 5. Tout répéter devant un officier, les détails qui heurtent la pudeur en particulier. J’ai pour habitude d’utiliser les vrais mots, je n’ai pas de gêne à parler de ça. Pourtant, je ne peux m’empêcher de rougir, de buter sur les termes les plus crus. Ma plus grande crainte, avant tout, c’est de me tromper. J’ai dit qu’il portait un imperméable beige, j’en suis sure. Non, non, en fait je crois qu’il était noir, et peut-être en laine. En laine, à la fin du mois de septembre, est-ce bien logique ? Tout compte fait, portait-il même un manteau ?

Ma mémoire est ma pire ennemie. Elle me perdra.

Après mon récit, les questions se sont enchaînées. J’avais peur d’un examen incisif, des reproches classiques que l’on nous rabâche : « Pourquoi vous l’avez suivi ? Vous n’aviez pas envie, c’est bien sûr ? ». Je ne sais pas si je me suis trouvée au bon endroit – pour cette fois –, ou si les deux dernières années de campagne #metoo ont réellement initié un changement, mais ce fut tout l’inverse. Aucune animosité dans ces interrogations, il faut de toute façon se préparer aux futures attaques de la défense. Je me le suis moi-même demandé mille fois. Pourquoi n’ai-je pas crié ? Pourquoi n’ai-je pas immédiatement porté plainte ? Les réponses s’énoncent d’elles-mêmes, simplement, honnêtement. Si elles viennent compléter le formulaire bien ficelé de l’enquêteur, c’est surtout mon esprit qu’elles éclairent, et mes dernières plaies de culpabilité qu’elles pansent.

« Pourquoi porter plainte maintenant ? ». C’est la dernière question qu’il m’a posée.

Le soir, j’ai rejoint Adèle à un apéro. C’est une des rares que j’avais mise au courant depuis peu. En arrivant, j’ai trinqué ma fierté avec elle. Je me sentais animée d’une force incroyable ce soir-là. Je suis rentrée à pied dans la nuit chaude. L’air portait encore ma joie silencieuse. Les pavés tintaient doucement sous mes pieds. Mais j’en voulais plus. J’avais envie de crier ma victoire dans toutes les rues. Je l’aurais gravé dans le bitume, je l’aurais dit à chaque passant, je l’aurais écrit sur les murs de tous les immeubles. Je débordais de ce cri, je ne savais où le déverser, alors je l’ai gardé pour moi.

***

Comme je suis loin, à présent, de cette exaltation. Sans m’en rendre compte, j’ai réveillé son souvenir et, après l’euphorie de la délivrance, dans le noir, je suis seule. Seule avec lui. Me revient en mémoire la demande de l’enquêteur : « Acceptez-vous une confrontation ? ». J’ai dit oui, car il m’a affirmé que ça ne pourrait qu’aider mon dossier. Mais je me sentais forte encore, portée par mon élan inconscient. Maintenant, cette perspective me terrifie. Sa présence tendra tout mon corps, son odeur me paralysera. Lorsque j’entendrai s’élever sa voix, je ne saurai plus parler.

Hier non plus, je ne savais plus parler. Ce week-end entre amis devait être heureux. Au lieu de cela, me voilà assise parmi eux, mais repliée sur moi. Je bois une bière et je pense à ma plainte. Je ris à une blague et je pense à ma plainte. Je danse et je pense à ma plainte. Ma plainte, plus rien n’existe en dehors d’elle. Quand vont-ils le convoquer ? Comment va-t-il réagir ? Puis-je me permettre d’espérer une issue en ma faveur quand la seule preuve que j’apporte est ma parole ? Des preuves justement, est-ce que je ne pourrais pas en trouver ? J’ai attrapé mon téléphone et j’ai creusé dans son historique. Au bout d’une heure de fouille obsessionnelle, j’ai trouvé deux publications Facebook qui confirment la date et l’adresse du bar où tout a commencé. Cette maigre découverte me calme un peu, pour un temps.

Par moment, je réintègre le présent, je me souviens qu’il faut faire bonne figure. Je joue mon propre rôle, j’essaye de me rappeler comment j’agis quand tout va bien. Je comble les trous comme je peux, il n’y a personne pour me souffler mon texte. Et nul ne s’y trompe. J’ai droit à quelques « ça va ? », on me chambre gentiment sur mes absences, et je réponds « oui, oui » avec un grand sourire qui se veut rassurant. Comme je voudrais parler.

Mais le silence me brûle la gorge, à m’étouffer. Je ne dois pas leur dire, je n’ai pas le droit de leur infliger ça, c’est un secret. J’étais persuadée, pourtant, que l’ère du secret était révolue.

J’ai fini par m’endormir au petit matin.

***

La semaine suivante, je me rends à l’Hôtel-Dieu. Le quartier est magnifique, on ne prend pas assez le temps de s’en rendre compte. En face de l’entrée du monument, une foule de badauds s’éparpille au hasard sur l’esplanade en pierres blanches. Ils ne semblent pas conscients de la solennité du lieu. J’entre sur la pointe des pieds et me fais indiquer l’UMJ, l’Unité médico-judiciaire.

C’est une chance que j’aie pu obtenir un rendez-vous si vite. Sur les conseils d’Adèle, j’ai guetté les désistements.

Si longtemps après les faits, il n’y a qu’une expertise psychologique pour estimer mon préjudice. Si longtemps après les faits, je ne me souviens pas de mon préjudice. Les questions se succèdent, à l’aune de mon incapacité à donner des réponses. Ai-je eu des difficultés à dormir ou à me concentrer pendant les semaines qui ont suivi ? Je n’en ai aucune idée. C’était il y a 7 ans. Je n’en suis pas morte, et je n’ai pas mis un point d’honneur à garder cette période en mémoire. Alors non, je ne sais pas, je ne sais plus. J’ai continué ma vie, j’ai fait avec.

La psy me dit d’un air désolé que, ce n’est pas juste, mais elle ne pourra pas me compter beaucoup de jours d’ITT. C’est comme ça qu’ils mesurent l’impact de mon viol. Je me fais l’impression d’être de retour au lycée, en train de quémander des points pour avoir la moyenne à mon contrôle. Mais malgré sa bonne volonté, ma prof n’en trouve pas assez. Tout ce qu’elle peut faire, c’est m’encourager à me rattraper lors du prochain devoir : une enquête psychologique plus approfondie, c’est ce qu’elle va demander.

Mais merde ! J’avais pourtant bien révisé. Je me suis peut-être trompée de niveau, ou trompée de classe. Dans tous les cas, je ne suis pas à ma place ici, je suis une imposteuse. Je ne rentre pas dans les cases, je ne suis pas suffisamment une victime, en fait. Je ne suis pas traumatisée, alors ce n’est peut-être pas si grave. Et c’est tant mieux d’ailleurs. Je devrais en être reconnaissante. Je le suis. Alors, pourquoi mon visage est-il trempé lorsque je sors ?

***

Non, il ne m’a pas traumatisée, j’ai au moins ça pour moi. Il m’a simplement fait taire. Il a fait céder mon corps, puis il a fait céder ma voix. Ni l’un, ni l’autre n’ont été assez forts pour lui résister. Et pourtant, forte, j’étais convaincue que je l’étais. J’avais ce sentiment d’invincibilité qui nous accompagne lorsqu’on est encore tout neuf, tout frais sorti de l’école, et que l’on découvre la liberté sans limites de l’étudiant. C’est peut-être ça qui m’a perdue.

Insouciante, confiante – trop peut-être –, imprudente vous diront certains. Peu importe. Je suis juste sortie, dans un bar, comme des dizaines d’autres soirs. J’y repense très souvent à ce soir-là, tous les jours presque, et j’ai toujours envie de le dire. Mais je suis aussi fatiguée d’en parler, fatiguée de raconter cette histoire en prenant soin de choisir les bons mots. Il ne faudrait pas brusquer ses amis, ou attrister ceux que l’on aime, et surtout, surtout il ne faudrait pas risquer de dire quoi que ce soit d’incriminant pour soi-même devant la police ou la justice. J’en ai assez, oui assez, de devoir mettre autant d’efforts à façonner les faits pour les rendre entendables. J’aimerais raconter simplement, comme cela me vient, comme je m’en souviens, ce que j’ai vécu.

Je me souviens… Je me souviens mal en vérité, comme d’un événement un peu marquant, mais dont on n’a pas forcément envie de se rappeler. Je me souviens qu’il ne faisait pas froid, pour commencer. C’était le début de l’automne, il faisait suffisamment bon pour marcher d’un pas traînant dans la rue à minuit. Je me rappelle aussi que j’étais contrariée, seule et un peu triste. Je venais de me faire quitter, certes pas par l’homme de ma vie, mais quand même. Mes amis m’avaient ignorée toute la soirée, ou bien c’est moi, peut-être, qui n’étais pas de leur humeur. Bref, j’étais désespérément en quête d’attention, et je ne la trouvais pas dans ce pub crasseux. J’avais envie de partir. J’allais partir.

Étais-je la proie idéale ? Je ne crois pas, en tout cas, qu’il l’avait calculé lorsqu’il est venu me parler. Il avait de l’assurance, il était plutôt grand, assez beau gosse dans son genre. Pas tout à fait le mien, mais digne d’intérêt tout de même. Et puis, il s’intéressait à moi. D’une façon ou d’une autre, c’était tout ce qui comptait. On a discuté, pas très longtemps je crois, puis il m’a dit « viens, on se barre d’ici, on sort ». Alors je me suis laissée entraîner. Je suis partie, mais avec lui.

On a marché, vers chez lui, vers chez moi. On habitait à peu près au même endroit. Sur le chemin, il m’a dit qu’il venait d’acheter un studio, il en était tout fier. On est arrivés en bas, il m’a proposé de visiter.

Pourquoi est-ce que je raconte encore cette histoire ? Indéfiniment, je la passe et je la repasse dans ma tête. C’est épuisant.

Bref, je suis montée. On a bu un verre, on a rigolé, il m’a poussée sur le matelas. Je lui ai dit doucement : « Arrête, je t’ai dit je suis pas d’humeur, j’ai pas envie de ça ». Ou sûrement d’autres mots, peu importe, le message était le même. Mais on ne parlait pas la même langue sûrement, puisqu’il a répondu en détachant mon jean. Je l’ai bloqué. Et je me suis répétée, plus fermement.

« Détends-toi, je ne vais rien te faire », a-t-il répliqué. Et il a attrapé mes poignets pour les poser de chaque côté de ma tête, pour que j’arrête de l’embêter. Ça je m’en rappelle bien. J’aurais pu aimer, dans d’autres circonstances. D’ailleurs, mon corps a aimé au début. Et il a réagi, mécaniquement. Quelle horreur. Parce que moi, moi je n’aimais pas. Et puis c’est le flou. Ce ne sont que des bribes de combats, physique et verbal, où j’ai eu le dessous. Je ne sais plus à quel moment, quoi, combien de temps. Je ne me rappelle que des paroles, un peu des miennes, surtout des siennes. « Fais pas ta pétasse, c’est pas toi qui choisis ! », « Tu exagères tout, je ne te fais rien », « Arrête de pleurnicher, t’es vraiment immature ».

Puis j’ai réussi, oui j’ai réussi, à partir.

***

J’ai tracé mon premier trait avec tellement d’application que le bord n’est pas droit. Et plus je repasse dessus pour effacer ce qui dépasse, plus cela semble dépasser. Ma seule réussite c’est de ne pas avoir déjà troué le papier. Je patiente sous l’oeil critique d’Adèle, que tombe la sentence : « Pas mal pour la première ! ». Ouf ! Je prends une autre feuille et je plonge à nouveau mon pinceau aux poils collés dans l’acrylique. Les courbes s’allongent et mes gestes s’assouplissent. Je remplis dix pages de toute ma détermination, puis je m’arrête pour contempler le travail accompli, non sans une certaine fierté. Pendant ce temps, Adèle en a fait dix-huit.

Son salon en est submergé. À la fin de l’après-midi, c’est à peine si j’arrive à trouver un passage dans l’étendue blanche que nous avons noircie.

J’ai hâte. J’ai peur aussi.

« La justice n’est pas prête », m’a dit Adèle calmement.

***

Pourquoi maintenant ?

Peut-être parce que 7 ans c’est le temps qu’il m’a fallu pour éteindre le silence qu’il m’avait imposé.

Et la route est longue encore, pour qu’il soit condamné. Alors, il faudra bien attendre.

Je suis sortie ce matin et j’ai repensé à cet après-midi où j’ai porté plainte. Avant de partir, l’officier m’a dit : « En tout cas, vous êtes entendue ».

J’ai traversé la rue, puis j’ai longé les commerces qui commençaient à s’animer. À l’angle suivant, face à moi, de grandes lettres noires s’étalaient : « Le viol ne doit plus être un secret ».

FIN

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Rarement dans le présent, souvent la tête ailleurs, mon imagination est trop vaste pour tenir sur un morceau de papier, mais tant pis je continue d’essayer. J’aime écrire depuis l’enfance. C’est un moyen d’expression qui m’a toujours mieux réussi quand il était difficile de faire entendre ma voix. Exercice d’autant moins évident dans une famille de 4 enfants. J’ai grandi à Paris et je travaille aujourd’hui comme consultante pour accompagner les transformations digitales. Je pense être une grande optimiste et cela m’a donné de la résilience. Si à travers mes textes je peux en transmettre un peu à mes lecteurs, c’est pour moi une récompense qui se suffit à elle-même.