Rencontre entre la mort et la maternité : deuil d’un avenir, naissance d’une autre mère.

C’était un matin de fin de printemps, elle s’était levée avec un étrange sentiment de tristesse. Pourtant, tout allait bien, elle était entourée de son mari, de son fils aîné de 3 ans, et elle s’apprêtait à donner la vie une seconde fois dans quelques semaines.

Tous étaient partis pour leur journée, elle se reposait. Elle devait aller à l’hôpital dans l’après-midi, pour son rendez-vous d’anesthésie préparatoire de l’accouchement arrivant.

Alors qu’elle se trouvait sous la douche, elle sentit comme une rupture dans son corps, dans sa tête, dans ses yeux. Puis, ce sentiment de tristesse qui grandissait.

Elle posa alors ses mains sur son ventre, demandant à son bébé s’il pouvait bouger pour la rassurer. Malgré les différentes tentatives, rien ne se passait. Elle sentait son pied, mais il ne réagissait pas.

Le rendez-vous passé, elle resta quelques minutes devant la porte des urgences gynécologiques, sans trouver le courage d’avancer et de la franchir.

De retour chez elle, ce sentiment de tristesse devenu de plus en plus présent dans son esprit, elle décida de retourner seule à la maternité.

Le ressenti qu’elle avait eu en elle toute la journée devint alors réel quand elle entendit « J’ai peur d’avoir une mauvaise nouvelle à vous annoncer madame. Le cœur de votre bébé s’est arrêté, je suis désolée ».

Le choc venait de la plonger dans un déni, qui ne pouvait être que la vérité pour elle. Elle venait de tomber dans un immense trou noir.

Deux jours plus tard, elle accouchait douloureusement de son bébé mort-né, aux côtés de son mari, dans un silence insoutenable.

Elle devait alors partir, avec ce sentiment si profond que son cœur se déchirait, il était vide et ses bras aussi. Il ne lui restait pour souvenirs que quelques photos, et les empreintes si minuscules de ce petit être.

Elle ne savait plus si elle avait le droit de vivre, elle n’avait plus aucune vision de son avenir. La mort brutale avait croisé son chemin.

Pourtant, chaque matin, elle se levait, entourée de son mari et de son fils. Eux, qui lui donnaient le courage de continuer à vivre.

Puis chaque semaine, après avoir laissé ce petit corps au cimetière, elle affrontait la réalité avec douleur, jusqu’au jour où son ventre qui avait servi de tombe retrouva en lui la vie.

Cette vie, c’était celle d’un troisième petit garçon. Il grandissait doucement en elle, il allait bien.

Inquiète à chaque seconde, elle entendait pourtant trop souvent « Il n’y a pas de raison ».

Y avait-il une raison pour que son deuxième enfant, lui, n’ait pas eu le droit de vivre ?

L’autopsie avait conclu que non, effectivement, il n’y avait aucune raison.

Alors, en son for intérieur, elle savait qu’elle serait rassurée, ce seul jour où elle tiendrait cet enfant dans ses bras, vivant et en bonne santé.

Le neuvième mois commencé, période de grossesse où elle avait appris la mort de son enfant, l’angoisse montait en elle.

Les médecins avaient donc tranché, avec son accord et celui de son mari, cet accouchement serait déclenché maintenant.

Quelques heures plus tard, elle accueillait son troisième bébé, avec un soulagement intense quand elle entendit ses cris.

Pourtant, elle ressentit très vite que quelque chose n’allait pas.

Elle comprit, en l’espace de quelques secondes, que son bébé ne respirait pas bien, quand la sage-femme l’emporta rapidement hors de la chambre et demanda à son mari de le suivre.

Alors qu’elle venait d’accoucher de son troisième enfant, la mort venait à nouveau dans son esprit.

Elle retournait dans sa chambre, seule, avec près d’elle un lit de nouveau-né vide.

Le choc fut plus intense le lendemain matin quand on lui annonça que son bébé n’arrivait plus à respirer seul, et qu’elle vit le SAMU l’emporter loin d’elle.

Elle venait de croiser à nouveau la mort, qui venait la narguer. Elle se sentait impuissante, seule, malgré la présence autour d’elle. Elle se sentait la seule responsable de ce qui arrivait à son enfant, de ce qui était arrivé à son deuxième enfant.

Pendant une semaine environ, elle allait passer jours et nuits au chevet de son bébé, autant qu’elle le pouvait. Elle avait peur, les médecins ne la rassuraient que très peu. Mais l’amour de sa famille et de son mari l’aidait à ne pas tomber dans cet immense trou noir qu’elle avait déjà connu.

Espoir et désespoir se mêlaient, jusqu’au jour où on lui accorda le droit d’entendre que son bébé allait pouvoir rentrer à la maison.

La chaleur du corps et de l’amour de cet enfant, la fierté de son aîné et de son mari, la remplissaient à nouveau de cette joie, qu’elle pensait avoir perdue à jamais.

Cette fois, allait-elle pouvoir commencer à se reconstruire ? Elle ne savait pas ce que la vie leur réservait encore, mais ce qu’elle savait, c’est qu’elle ferait tout pour profiter de chaque instant avec ceux qu’elle aimait.

Petit à petit, elle devenait de plus en plus forte, elle assumait cette fragilité en elle, elle devenait cette maman de trois enfants, dont deux seulement étaient physiquement présents. La mort n’avait pas gagné cette fois !

Elle continuait, avec cette force en elle. Celle qui lui donnait le courage d’avancer, de changer ses projets de vie, et d’assumer les choix qu’elle faisait.

Tout ce qu’elle venait de vivre avait remis en question le parcours qu’elle avait tracé jusqu’à ce jour, et elle ne voulait plus perdre de temps avec les « on verra demain » ou encore « quand le moment sera venu ».

Y avait-il réellement un temps pour être heureux ?

Non ! Elle le savait, tout pouvait s’arrêter d’un instant à l’autre.

Avec son mari, ils décidèrent donc de se marier, auprès des personnes qu’ils aimaient. Ils étaient désormais une famille unie, non pas de quatre, mais de cinq personnes. Elle portait le même nom que lui, mais pas seulement, elle portait aussi le même nom que ses trois enfants.

Par la suite, en dépit des angoisses qui la suivaient maintenant, et elle en avait conscience, qui la suivraient à jamais, elle décidait d’arrêter le travail qu’elle faisait, pour se lancer dans une autre aventure.

Seule, elle débutait un autre chemin de vie professionnelle.

Les mois passaient, et elle sentait une sorte d’apaisement en elle.

Des débuts remplis de doutes, les retours sur son nouveau travail la confortaient dans cette nouvelle voie.

Elle commençait à prendre confiance en elle.

Chaque semaine et mois qui passaient, elle était fière de cette femme qu’elle devenait. Une femme qui avait décidé de ne plus laisser la vie décider pour elle. Une femme fragile, mais dotée d’une force incroyable, d’une volonté de vivre. L’insouciance n’existait plus dans sa vie, mais l’espoir, lui, était revenu.

Elle était devenue une femme, une maman, que la mort avait rendue vivante. Elle remerciait désormais son enfant pour cette leçon de vie et d’amour qu’il lui avait envoyé, jamais elle ne l’oublierait.

FIN

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Je suis dans la vie officiante de cérémonie laïque, c’est à dire que je créer, j’écrie et j’officie des cérémonies personnalisées, pour les mariages ou parrainages laïcs. Je suis également en train de travailler à le développer aussi pour les cérémonies funéraires, mais ce n’est pas encore fait.

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